Détail d’une photo d’Yves Jeanmougin, Koubba d’Imma B’nêt, Beni-Haoua, Algérie

Aux fils de Hawa
Maïssa Bey Écrivaine

                 Je suis la première femme échouée au bord de ce qui fut le premier rivage.
                 Sur mon corps tatoué
                 S’écrivent en signes mystérieux
                 Les contours de vos vaines chimères.
                 Je rôde aux abords obscurs d’une ville ceinte de remparts de poussière.
                 Je suis l’ancêtre vive
                 Écharde à jamais fichée à la pointe de vos mémoires.


Pour la retrouver, il faut s’asseoir au bord du rivage et écouter ce que nous confiera la mer. Si elle y consent. En épouser la rumeur. Traverser les siècles, avancer en aveugle, les bras tendus et accepter de perdre pied, de se laisser submerger à son tour. Dérouler les lentes vibrations au-dedans de soi, et en capturer seulement les échos dans une conscience vierge, lavée de tout désir de re-connaissance qui viendrait dénaturer le rêve. C’est cela : glisser sur les abrupts, jusqu’aux tréfonds, dériver, se perdre, effacer de soi toute autre sensation. Toute autre tentation.

Comment franchir les seuils des légendes et des silences accumulés en strates par tant de générations ? Comment faire pour que l’histoire se lise enfin débarrassée de la démesure des mythes, des passions et des rejets ? Simplement en se dépouillant de toutes les certitudes du savoir.

Il faut attendre, parfois longuement, que surviennent les mots, et les laisser lever en soi jusqu’à ce que prenne forme une image, une seule, suspendue entre ciel et mer.

Ce pourrait être une voix aussi. […]

En cet instant, peu importent les précisions historiques que, depuis, j’ai pu glaner çà et là, le nom du bateau, la date du naufrage, le nombre de victimes et les échanges très protocolaires de courrier entre les plus hautes autorités de part et d’autre de la mer blanche du milieu.

Elle, Imma B’nêt. Maintenant, en écriture, ombre retrouvée, reconnue, nommée. Quelque vision peut-être, entrevue dans la fragile lueur d’un matin, dans le pas entendu aux confins d’un rêve étrange surgi de ces lectures mêmes.

Elle, Imma B’nêt, désormais élevée au rang de sainte, de marabout, nous dit-on encore. Comme pour nous expliquer l’évidence première : seuls ceux qui savent aimer peuvent prétendre à l’éternité.

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Déliés, une descendance algérienne

Laurence Huet textes & polyphonie
Hachemi Mokrane calligraphies
Yves Jeanmougin photographies
Mariela Damian témoignages

Préface de Maïssa Bey

Livre relié 24 x 22 cm / 112 pages / 98 photos et illustrations n & b
et couleur / Disque 56.40 mn / Musique Titus Oppmann
Métamorphoses / France Culture (2005)
ISBN 2-9514410-2-9

20 € [ au lieu de 30 € ]

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Métamorphoses
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Maïssa Bey
Née en 1951 à Kasr El Boukhari (Algérie). Conseillère pédagogique dans l’ouest de l’Algérie, elle est également présidente d’une association culturelle de femmes algériennes, Parole et écriture. Elle est notamment l’auteur de : Au commencement était la mer, Marsa (1996), Nouvelles d’Algérie, Grasset (1998 ), À contre-silence, Paroles d’Aube (1999), Cette fille-là, Éditions de l’Aube (2001), Entendez-vous dans les montagnes…, Éditions de l’Aube (2002), Sous le jasmin la nuit, Éditions de l’Aube (2004).